Les ocres, le Colorado Provençal !
Nichée sur ses ocres, le village de Roussillon se situe entre Apt et Gordes (le village où vivent quelques stars) dans le Vaucluse et faisant parti du parc naturel du Lubéron.
Avant toutes choses une petite explication sur cette raretée géologique enclavée au beau milieu des terres de Lubéron.
Il y a 230 millions d'années, la Provence est recouverte par la mer et le restera pendant une très longue période.
Plusieurs milliers de mètres de sédiments arrachés aux continents alentour s'accumulent au fond des eaux. Ils formeront par la suite les calcaires blancs si caractéristiques de ce pays : mont Ventoux, Luberon, Sainte Victoire, canyon du Verdon, calanques etc.
Vers -110 millions d'années, la mer s'approfondit. Les sédiments qui se déposent au fond des eaux sont des argiles grises qui viennent recouvrir les calcaires et auxquelles les géologues donneront le nom de " terrains aptiens ".
Puis ce bassin marin étant presque comblé, c'est dans des eaux peu profondes et agitées par les courants que vont se déposer, au dessus des argiles, des sables de couleur verte, c'est la glauconie, petits grains minéraux verts, qui leur confère leur couleur.
Se produit alors en Provence, aux alentours de -100 millions d'années, un bouleversement important.
Après cette longue période de la vie marine, à la suite de mouvements du sol, la Provence se retrouve hors de l'eau.
A cette époque, le climat y est tropical. Des pluies diluviennes lessivent les sables verts fraîchement émergés du nouveau continent, les transformant lentement en sables ocreux, puis en sables blancs, par étapes successives :
- dissolution, par les eaux de pluie qui circulent en profondeur, de tous les éléments constituant le sable vert, excepté le sable lui-même très résistant.
- cristallisation à partir de cette " solution " d'autres minéraux, kaolinite et goethite, qui remplissent les vides entre les grains de sable. C'est la naissance des sables ocreux.
- le lessivage qui se poursuit sur ces sables ocreux évacue l'hydroxyde de fer qui les colore. Ne restent en place que les sables blancs.
En surface, l'hydroxyde de fer se concentre pour former une cuirasse ferrugineuse semblable à celle des latérites africaines. Quant à la couleur rouge, jaune ou orangée de ces sables ocrés, elle garde encore une partie de son secret.
Bien sûr, on connaît la principale responsable : la goethite, mais par quel mécanisme exact la nature a-t-elle abouti à une telle profusion de teintes ? Cela reste encore à définir. L’ocre est un pigment naturel mêlé aux sables des falaises. L’oxyde de fer le colore du jaune au violacé. Ce paysage minéral a été façonné par la main de l’homme et par l’érosion.
L’ocre fut tout d’abord utilisée pour des peintures rupestres, puis fut redécouverte au moment de la Révolution et commercialisée pendant un siècle dans le monde entier pour ses propriétés colorantes inaltérables. Pigment naturel, l'ocre fait aujourd’hui un retour en force, redonnant vie à de nombreuses activités, touchant la peinture, la décoration, la poterie et le bâtiment.
Passons maintenant à la flore de cet endroit féérique !
Si le chêne vert, le chêne blanc, le pin d'Alep, le pin sylvestre, le thym, le romarin ou le buis poussent indifféremment sur les sols calcaires ou siliceux, il est des variétés qui caractérisent plus particulièrement les ocres. Le pin maritime aurait envahi ces zones à la suite des grandes déforestations qui ont accompagné la mise en exploitation des carrières. Rare, le châtaignier s'épanouit au frais, dans le fond des vallons. Les sous bois sont occupés par la bruyère à balai dont on se servait autrefois pour fabriquer des balais et la bruyère commune donne, à l'automne, de magnifiques et longues grappes de fleurs en forme de clochettes d'une couleur rose vif. À terrain découvert, ces bruyères colonisent les sols et forment alors un maquis dense. Témoins de la pureté de l'air mais aussi de l'humidité ambiante, les lichens s'accrochent à l'écorce des arbres dans les massifs les plus orientaux. Les esthètes apprécieront particulièrement la diversité des orchidées sauvages ; quelques vingt six variétés cohabitent dont certaines sont extrêmement rares. Les amoureux de la nature auront à cœur de les admirer et de les photographier sans y toucher. La grande fréquentation de ces lieux met en effet ces variétés en danger de disparition.
En avant pour la visite !
Deux parcours (court ou long) vous permettent une visite de 30 minutes à 60 minutes, mais vous pouvez aussi le contempler aussi longtemps que vous le désirez. De discrets pupitres jalonnent votre parcours pour des explications sur la géologie, la flore, l’histoire, le massif ocrier du Luberon…
Quand le ciel est bien dégagé, il vous est permis de voir le Mont Ventoux ! Je conseille à tous ceux désirant visiter ce site merveilleux, de le faire si cela est possible, à chaque saison ou encore à plusieurs moments de la journée pour profiter un maximum des variations de couleurs changeantes selon la lumière !
Encore une fois, on se sent minuscule face à cette nature !
Pour poursuivre cette aventure qui j'espére vous fera rêver, je m'en vais vous conter la légende de l'origine des ocres parvenu au moyen âge.
"Dame Sermonde et le Seigneur Raymond d'Avignon vivaient au château de Roussillon. Guillaume de Cabestan, fils du Seigneur de Cabestan dans les Hautes Alpes, fut engagé au château de Roussillon, comme page, pour faire son apprentissage de bon chevalier.
Raymond d'Avignon, qui partait régulièrement à la chasse, délaissait son épouse et la laissait souvent seule. C'est ainsi que Dame Sermonde et Guillaume tombèrent amoureux l'un de l'autre.
Pour en avoir le cœur net, Raymond d'Avignon décida de se rendre à Tarascon, avec Guillaume, pour en avoir la confirmation. Agnès comprit très vite la situation et pour sauver les deux amants, joua le jeu. Mais apprenant tout cela, Dame Sermonde, piquée dans son amour-propre et indignée de la conduite de son époux, exigea de Guillaume qu'il avouât tout dans l'une de ses chansons.
Guillaume s'exécuta et Raymond d'Avignon, apprenant la vérité, entra dans une fureur noire, et décida de se venger. Au cours d'une partie de chasse, il poignarda Guillaume dans le dos, lui trancha la tête et lui arracha le cœur.
Il revint au château, et demanda à son cuisinier de préparer le cœur à la sauce piquante.
Dame Sermonde s'étant régalée de son mets préféré, apprit de son époux qu'il s'agissait du cœur de son amant : " Seigneur, vous m'avez offert un si bon repas que jamais je ne veux plus en goûter un autre ".
Sentant que sa femme lui échappait, Raymond d'Avignon tira son épée, mais Dame Sermonde s'enfuit hors du château et se précipita du haut du Castrum, dans le vide. Son corps sanglant a coloré à jamais les terres de Roussillon et une source jaillit là où son corps termina sa course."
J'espère vous avoir fait partager un moment magique à travers cette article !
Et merci à tous ceux qui me liront.
Sam